Les possibilités sont limitées en ce jour de juin, du vent au sud, des nuages au nord et, contre toute attente, une poche de calme et de soleil en Savoie.... Ce qui me pousse à retourner dans ce havre de paix qu'est ce dôme de la Girotte. En arrivant à Hauteluce au petit matin on ne m'avait pas menti, le soleil est là entre des cumulus inoffensifs et les arbres oscillent mollement.
Seulement, les nuées sombres, lourdes et humides qui encombraient l'ouest ont l'air de s'étendre beaucoup plus rapidement que prévu. En effet à peine ai-je commencé la marche qu'un plafond bas est venu prendre place dans toute la vallée. Sa base est hélas moins haute que le sommet convoité, l'éclaircie ne fut que matinale, limitée aux aurores. Au dessus des chalets de la Commanderie règne subitement un brouillard glacial et vraiment humide. Dans la brise, l'eau perle sur chaque poil qu'il soit des sourcils, des bras, ou même des cheveux. Le vol semble compromis mais autant poursuivre jusqu'au sommet. Au Plan des Mouilles, je trouve un ballon de la kermesse du sou des écoles de Saint Genis Pouilly (01) il a été lâché hier et il attend d’être réexpédié par la poste, le plus éloigné étant le gagnant. Bien que pas très écologique la démarche est amusante, celui-ci par exemple a parcouru 80 kilomètres.
La progression est oppressante dans ce brouillard épais, au col comme au sommet, la vue est réduite à la plus proche des proximités, du lac en contrebas ne s'échappe que le bruit sourd de la grande cascade qui l'alimente. La brise contre toute attente est bien établie de sud ??? Au bout d'une bonne demi-heure d'attente à regarder tout le microcosme du monde qui peut vivre dans les herbes, – puisque la vue du panorama grandiose est aujourd’hui fermée - le jeux de la rosée donne des fines perles à toute la végétation, aussi petite fut-elle. Rien ne laisse croire que le plafond puisse se dégager. Pourtant il n'est pas si épais vers le bas. Alors je remets le sac et commence à descendre directement du coté du vent à la recherche de la lumière. C'est qu'il s'agit de vite la trouver car il convient de garder une certaine marge de hauteur pour passer le plateau de la Commanderie.
Alors que les toits des chalets les plus élevés apparaissent entre les nuages filandreux, la clarté semble devenir plus intense. Vite je pose le sac et scrute l’horizon. Bien que le ventre des nuages ne semble pas vraiment soudé en un plafond net et lisse, la vallée apparaît par intermittence. Ni une ni deux, le matériel est déballé et mis en position. Le vent est moins fort qu'au sommet mais il reste parfaitement orienté. La configuration des lieux permet de décoller quoi qu'il arrive et d’atterrir avant la rangée de grands sapins qui bordent le plateau - au cas où. Confiant, je décolle dès que je suis prêt avec une visibilité maintenant bonne vers la vallée. Le suspense des sapins aura duré jusqu'au dernier moment. Bizarrement malgré le vent de face et la trajectoire qui s'appuie sur le relief au vent, la chute est sensible et les turbulences assez gênantes, je passe par dessus les premiers sapins avec une marge minimale. Voila un vol qui n'aura pas duré longtemps, car dans la vallée il me semble voir bouger les arbres avec une amplitude qui tranche avec le calme du matin. Après quelques virages bien envoyés, l'approche est rock'n roll avant de me poser dans une brise turbulente jusqu'au sol. Les champs ne sont pas encore fauchés mais il y a pas mal de pâtures clairsemées de vaches, et d'autres vides de tout bétail, l'une d'elle sera ma cible mais c'est sans compter sur le vent au sol qui me la fait rater de quelques mètres....
Bon je ne serai pas redescendu à pied, mais le vol ne fut pas des plus agréables....