De retour des Pyrénées où le temps fut superbe, nous sommes rentrés hier soir à Grenoble et le beau temps persiste. Mais le revers de la médaille avec l’anticyclone hivernal, c’est la présence souvent tenace d’une mer de nuage stagnant à une altitude variable en fonction des jours. Évidemment pour voler ce n’est pas terrible. Au moins celle du jour a t’elle la décence de ne pas se traîner en vallée, elle culmine à la hauteur du plateau de Saint Hilaire. Manque de bol c’est là que je me trouve aujourd’hui, et comme nous avons le plaisir de recevoir la famille à midi, je n’ai pas loisir d’attendre une hypothétique amélioration. Après cette belle promenade sous les buis qui ne veulent pas mourrir malgré les attaques répétées de la pyrale, me voilà donc sur le plateau des Petites Roches, à la limite exacte des nuages qui encombrent la vallée, on a l’impression d’être au bord de la mer !
Rien que pour descendre tout au bord du plateau, là où est le décollage en moquette, on plonge littéralement dans l’écume du jour, pour rapidement se retrouver dans une épaisse purée de pois. Sans mentir, on n’y voit pas à 10 mètres, mes velléités d’en découdre avec ce brouillard en prennent un coup.
L’envie de voler est déjà moins forte, pourtant quelques parapentistes sont en observation sur la belle moquette, il y a même une voile étalée. Malgré les commentaires pessimistes du groupe en attente, j’étale la voile sans même les distinguer dans cette brume épaisse. Étrange sensation que d’attendre devant le mur de coton. L’autre parapentiste a aussi enfilé sa sellette, mais comme il tarde à décoller, une fois prêt, j’annonce mon départ imminent afin de prévenir le gars invisible en faction au bout du terrain, et en avant.
Pour garder le cap, je suis la couture entre deux lés de moquette, la voile monte impeccable et j’entre à corps perdu dans la ouate encore éclatante de soleil. Sans rien y voir, je garde le cap initial et quand le brouillard se fait plus sombre, je sors mon téléphone gps et observe le seul instrument en mesure de me donner une information de ma position. C’est facile, il y a un point sur la carte IGN et une trace rouge derrière. Après une ou deux corrections de cap, et de trop longues secondes, apparaît enfin le fond de la vallée au loin en bas. Si la trace rouge du GPS au milieu du petit écran rassure, c’est avec soulagement que j’entrevois le sol et sa réalité apaisante. Juste sous mes pieds passe la cible de l’atterrissage officiel, il ne reste plus qu’à ranger le téléphone et profiter du paysage qui s’offre maintenant à moi. Alors que je traîne au gré des circonvolutions de la voile, apparaît sous les nuages le deuxième pilote qui vole aux instruments, il surgit de nulle part et semble encore collé au plafond.
Alors que j’envisage un axe d’atterrissage optimum, arrive l’autre gars à toute vitesse dans une série de 360 tellement serrés que le centre de rotation est entre le pilote et la voile ! Autant dire que la centrifugeuse est au maximum. Il se posera juste devant moi après un coup de frein magistral avant l’impact. Y a des cadors !