S'il faut trouver un avantage à l'air polaire qui nous vient directement de la Sibérie, c'est bien celui de provoquer un choc thermique, aussi étrange que cela puisse paraître.... en effet, s'il ne fait que 2° dans la vallée, sitôt en altitude, la glaciale masse d'air russe fait rapidement descendre le thermomètre largement sous le zéro, il suffit alors de la moindre caresse du soleil blafard pour déclencher de vastes courants ascendants.
C'est bien dans cet optique que je déboule sur la grande prairie enneigée du Col de Baure, seulement voila, un épais brouillard masque le paysage, pas question de décoller ici sans rien y voir. Au bout d'une demi-heure d'attente, le moral est dans les chaussettes, rien ne bouge. C'est à ce moment précis qu'un renard passe nonchalant en contrebas ! J'attendais un signe du ciel, il m'apparaît sous les traits d'un Goupil. Sans plus attendre et surexcité, la voile est installée sur la neige glacée. C'est un signe qui ne trompe pas, avec Loïc, quand on voit un renard au petit matin, c'est le présage infaillible de bonnes conditions, et elle le seront.
Le temps de déplier la voile, le soleil fait son apparition, c'est dans un état trop fébrile que je m'élance.... Catastrophe, avec le froid, j'ai lâché la poignée de frein.... décollage raté. Le vent étant parfait, inutile de remonter, un coup sur les ficelles, la voile monte et hop dans la brise sibérienne ! Deux guns pilotés par des kadors tournent déjà devant le relief ( ils viennent sans doute de Saint Hilaire). C'est donc une valse à trois temps qui commence dans les douces et belles ascendances bolcheviques. Seul bémol, prendre des photos avec les mains gourdes, cela relève de l'exploit le plus intrépide.
Les doigts complètement gelés sonnent l'heure de la retraite. Après avoir plusieurs fois atteint la couche nuageuse qui s'amenuise lentement, cap sur l'atterrissage. En bas les manches à air sont folles, le vent est fort et inconstant. Connaissant la brise sournoise qui complique l'atterrissage officiel en cas d'instabilité, j'opte avec couardise pour un repli sur un plus vaste terrain bien dégagé.
Encore une fois, la vision matinale du renard sauvage n'a pas failli, c'est un signe qui ne trompe pas, la sortie est une réussite !